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samedi, 31 décembre 2016

Une Semaine et un jour

   C'est le temps pour que passe le deuil traditionnel, chez les juifs. On découvre donc une famille de la classe moyenne israélienne (la mère est institutrice, le père employé dans un magasin de prêt-à-porter), frappée par le décès du fils unique (sans doute victime d'un cancer). Vus de l'extérieur, de prime abord, les "héros" ne sont pas sympathiques. Elle (Evgenia Dodina, remarquée il y a quelques années dans L'Attentat) semble assez froide, très sûre d'elle. On sent qu'elle "porte la culotte" dans le couple. Lui paraît immature. Il a des sautes d'humeur et des réactions de gamin.

   Le talent du réalisateur est de finir par nous les rendre sympathiques, parce qu'il nous fait comprendre ce qu'ils endurent. Les époux ne réagissent pas au deuil de la même manière. Vicky tente de ne rien laisser paraître et de reprendre sa vie comme auparavant. Pour décompresser, elle court. Eyal (le mari) végète à la maison, se laisse aller et tente (pathétiquement) de se rouler des joints.

   L'arrivée du fils des voisins (censés être des amis) va changer la donne. C'est un djeunse, un peu crétin, mais qui a bon fond. Dans le passé, c'était un bon copain du fils disparu. Avec le temps, la différence d'âge entre les deux garçons a fait que le livreur s'est détaché du gamin malade. Il est néanmoins resté assez proche du père, auquel il va être très utile... parfois à son corps défendant !

   C'est la bonne surprise de l'intrigue : au deuil se superposent des instants de comédie, vraiment bienvenus. Il y a évidemment tout ce qui touche au cannabis. Mais il convient aussi de mentionner les délicates relations avec les amis, en particulier avec le couple très "ardent", qui n'a pas compris à quel point il peut être inconvenant de copuler bruyamment pendant le deuil des voisins !

   L'histoire se conclut au cimetière, mais lors d'un autre enterrement que celui du fils des héros. Pour le père, c'est une catharsis et pour les spectateurs, un petit bijou d'émotion.

L'Ami, François d'Assise et ses frères

   Cette évocation de la vie du saint du XIIIe siècle s'appuie sur une prestigieuse distribution franco-italienne. A l'image de son sujet, la réalisation se veut sans concession. Du coup, même si la mise en scène fait preuve d'un incontestable brio, l'ensemble est assez austère, un peu à l'image de ce qu'on a pu voir récemment dans Une Vie.

   Quel que soit l'intérêt que l'on porte aux paysages et aux animaux qui peuplent la campagne italienne de l'époque, ce sont les rapports humains qui éveillent l'intérêt. Cette reconstitution tente de nous faire comprendre les débats qui agitaient les chrétiens de l'époque. Le groupe qui suit François d'Assise est particulièrement tourné vers la pauvreté.

   Mendiants, les Franciscains les plus endurcis prennent la parole d'Evangile au pied de la lettre et rejettent toute possession matérielle... et toute autorité. Plus pragmatique, une minorité (autour d'Elie, qui fut le plus fidèle disciple), pense qu'il faut s'accommoder des pouvoirs existants et qu'il ne faut négliger aucun moyen pour venir en aide aux pauvres. J'ai été plus convaincu par ceux-ci, menés par un Jérémie Rénier très inspiré.

   L'histoire est découpée en chapitres, qui portent le nom d'un ou plusieurs personnages. Fort logiquement, le premier s'intitule "François". On y découvre l'homme charismatique et pénétré de sa mission, ainsi que l'influence qu'il exerce sur son entourage. Le deuxième s'intitule "Etienne". On y rencontre un nouveau membre de la troupe, un bébé abandonné qui va grandir au contact des frères. Dans le troisième chapitre, "Dominique", il y est plus question de l'un de ceux-ci, un peu exalté. La quatrième partie, "Elie", est davantage centrée sur le disciple qui va trahir le maître, mais finalement peut-être pour le bien de son oeuvre. L'intrigue se conclut sur "Les Frères", qui évoque surtout les derniers moments de François.

   Le problème est, qu'outre son austérité, le film ne veut pas choisir entre les deux camps... et qu'il me semble manquer d'objectivité quant au personnage de François, qu'on croirait sorti d'une hagiographie.

jeudi, 29 décembre 2016

La Jeune Fille sans mains

   A l'origine, c'est un conte des frères Grimm. (Attention : sur le site auquel mène le lien qui précède, la version anglaise est sans doute plus fidèle à l'original que la traduction française.) Il a été adapté en film d'animation par Sébastien Laudenbach, dont l'oncle Philippe (un des seconds rôles les plus connus du cinéma français) a prêté sa voix au personnage du diable.

   C'est d'abord une histoire de cupidité, celle du père de l'héroïne, un meunier que le diable va prendre dans ses filets. Plus loin, on voit que la fille accorde peu de prix aux prothèses en or (en argent, dans le conte) que le prince lui a fait faire.

   C'est aussi une histoire d'amour. Celui des parents pour leur fille et celui qui va naître entre le prince et celle-ci. C'est la mère qui laisse d'abord le plus libre cours à ses sentiments, le père étant rattrapé par ceux-ci (ainsi que par la culpabilité) bien plus tard. Ces éléments, très allusifs dans le conte, sont développés dans le film. lls densifient l'intrigue et, à mon avis, sont bien dans l'esprit d'une histoire destinée aux enfants.

   Comme c'est un conte à l'ancienne, il n'est pas aseptisé. L'héroïne se fait amputer des mains et le diable tente de la faire assassiner, une fois qu'elle a été épousée par le prince et qu'elle a donné naissance à un enfant. Dans le film, le démon semble mû par le désir de soumettre la volonté de la jeune femme trop pure à son goût. Le réalisateur a évacué l'arrière-plan chrétien que les frères Grimm avaient donné à l'histoire. Il est remplacé par des références plus panthéistes, comme cette déesse aquatique qui va aider la jeune fille. Celle-ci a la (délicieuse) voix d'Elina Löwensohn, ancienne égérie de Hal Hartley, qu'on a pu voir ces dernières années dans Romaine par moins 30, Vénus noire ou encore La Chambre interdite.

   Si le fond de l'histoire est parfois très dur, il est contrebalancé par la voix douce de certains personnages, l'héroïne (Anaïs Demoustier), le prince (Jérémie Elkaïm) et la déesse. Et puis il y a les dessins. C'est de la peinture animée, volontairement incomplète : les personnages ne sont pas complètement "remplis", ce qui donne une grande fluidité à leurs mouvements.

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   Le style a pu déconcerter certains spectateurs. Moi, j'ai aimé et j'ai été emporté par cette histoire d'amour et de mort, qui voit une jeune femme abandonnée tenter de se créer un petit paradis terrestre.

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Norm

   Cette animation de saison a puisé son inspiration (notamment) dans L'Age de glace et Madagascar. Les personnages les plus attrayants sont d'ailleurs les petits lémuriens indestructibles, sortes de mini-samouraïs au service du héros et de sa cause (la défense de l'Arctique)... et puis, surtout, ils pètent, ils rotent et ils pissent !

   Le problème vient plutôt de Norm, l'ours polaire qui parle et comprend le langage humain (comme son grand-père d'ailleurs). Pour les adolescents et les adultes, c'est conceptuellement évident. En revanche, pour les petits, étant donné que rien ne distingue le langage de Norm selon qu'il s'adresse aux autres animaux ou aux humains, cela n'est pas super-évident. Ça l'est d'autant moins que, par moments, l'intrigue va trop vite, ne prenant pas assez de temps à expliquer certains éléments. Du coup, des ellipses mal choisies nuisent à notre plaisir.

   Pourtant, le film démarre bien avec cette poursuite du phoque... que l'ours ne parvient pas à manger. C'est assez original et il y a du gag à la clé. Mais cela retombe assez vite (sauf quand les lémuriens sont de la partie).

   L'intervention des humains est censée faire remonter la tension. J'ai apprécié que soient tournés en ridicule ces touristes de l'extrême. J'ai aussi trouvé gonflé qu'un dessin animé destiné au grand public soit autant de parti-pris : l'intrigue est furieusement écologiste, voire anticapitaliste, quand on voit le portrait qui est fait des investisseurs. (En tendant l'oreille, on pourra même percevoir une allusion au mouvement Occupy Wall Street.) Hélas, les bonnes intentions ne suffisent pas à faire un bon film.

   Au niveau de l'animation, c'est moyen, ni très bon, ni mauvais. La plupart des personnages sont réussis (et bien doublés), mais, graphiquement, cela dépasse à peine la qualité des productions télévisuelles. On peut même remarquer quelques faiblesses, au niveau des déplacements de certains objets (bateau, grue, voiture hélicoptère) : cela manque de naturel.

   L'ensemble n'est pas déplaisant mais, comparé aux films d'animation qui sont sortis ces dix-quinze dernières années, c'est décevant. Mieux vaut aller avoir Vaiana ou Ballerina.

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mercredi, 28 décembre 2016

Algérie du possible

   Ce documentaire tourne autour de la mort d'Yves Mathieu, anticolonialiste français décédé dans un mystérieux accident de la route, en 1966, dans l'Algérie indépendante. Il a été réalisé par sa fille, Viviane Candas. Pour cela, il lui a fallu du temps, plus de quatre ans : parmi les personnes interrogées, on reconnaît l'avocat Jacques Vergès, mort en 2013 (et dont le frère est décédé le mois dernier).

   La première partie du film présente la lutte pendant la guerre d'Algérie. Yves Mathieu, ancien résistant, est à l'époque un avocat communiste, qui défend les combattants du FLN et les Métropolitains ou les pieds-noirs qui soutiennent sa cause. L'affaire la plus retentissante est celle de l'attentat contre les installations industrialo-portuaires de Marseille. Techniquement, à l'écran, la réalisatrice croise les images d'archives avec des reconstitutions s'appuyant sur des objets : toge d'avocat, stylo, carte d'identité... Cela donne un aspect concret aux propos qui sont tenus. Je reproche toutefois au film de ne pas clairement distinguer (pour les spectateurs non avertis) les images d'archives des extraits de fiction. Tout est mis sur le même plan.

   Pour les militants, le plus dur a commencé après la guerre, lorsque l'Algérie est devenue indépendante. Yves Mathieu est resté en Algérie. Il faisait partie de ceux qui pensaient que la libération de l'Algérie ne devait pas se limiter à un mouvement nationaliste, mais qu'elle devait s'accompagner d'une révolution sociale. A l'époque, le modèle yougoslave a du prestige chez les gauchistes. On a donc tenté une expérience d'autogestion dans les campagnes algériennes. Je dois avouer qu'à ce moment-là, j'ai un peu décroché.

   Mon intérêt s'est réveillé dès qu'il a été question d'éclaircir les circonstances de la mort d'Yves Mathieu. La réalisatrice nous décrit les tensions qui agitaient le pouvoir algérien à cette époque. En s'appuyant sur des témoignages précis, elle a le courage de dire ce que beaucoup savent depuis longtemps à propos du pouvoir exercé par le FLN : certains clans ont confisqué la révolution algérienne à leur profit et ont mis en place une dictature qui n'avait rien à envier à la domination coloniale française, dont elle a repris bien des travers. D'ailleurs, c'est fou comme la disparition d'Yves Mathieu m'a rappelé celle de Maurice Audin, autre pied-noir communiste favorable à l'indépendance de l'Algérie.

   Il reste que la mort d'Yves Mathieu conserve son parfum de mystère. Sur ce sujet précis, la réalisatrice n'a pu recueillir que des témoignages de seconde main. Officiellement, le décès est dû à un accident de la route, la voiture dans laquelle circulait l'avocat ayant été percutée par... un camion de l'armée algérienne. Curieux, tout de même.

   P.S.

   Les amateurs de curiosités apprécieront d'entendre un extrait d'un discours prononcé en français par Che Guevara, à l'occasion de sa venue en Algérie, en 1965. (Il y était déjà venu en 1963.)

mardi, 27 décembre 2016

Assassin's Creed

   Ce "credo de l'assassin" est l'adaptation d'un célèbre jeu vidéo... mais on peut (comme moi) voir le film sans être un "gaimeur" ou une "gaimeuse"... à condition de passer outre certaines invraisemblances scénaristiques.

   L'action se déroule à notre époque et à la fin du XVe siècle (autour de la prise de Grenade, qui conclut la Reconquista). Or, sont présents à l'écran des Templiers, dont l'ordre a pourtant été supprimé au début du XIVe siècle, l'essentiel de ses biens revenant aux Hospitaliers. Quitte à situer l'intrigue en Espagne, on aurait plutôt dû évoquer l'ordre de Calatrava, dont des membres ont participé à la prise de Grenade.

   Un autre problème est la proximité affichée dans le film entre les pseudo-Templiers et l'Inquisition... une totale incohérence historique ! Et que dire de la présence dans la péninsule ibérique de ces Assassins, dont on nous rappelle l'origine proche-orientale... Cerise sur le gâteau : les "gentils" Assassins veulent empêcher les méchants de s'emparer de la "pomme d'Eden" (pas la pomme d'Adam, hein !), sorte de boule de pétanque méga-puissante.

   Bref, au niveau de l'intrigue, c'est un gloubi-boulga de références mal maîtrisées... mais le pire est que cela marche ! Une fois qu'on est entré dans l'histoire et qu'on a compris qui est qui, où sont les méchants, où sont les gentils et qui est susceptible de changer de camp (ça se devine assez vite), on peut savourer un excellent film d'aventures.

   Pour moi, les meilleures scènes sont celles censées se dérouler à Grenade, en 1492. C'est d'une force et d'une beauté extraordinaires, avec une réelle maîtrise de la direction d'acteurs. A chaque fois qu'on nous transporte à cette époque, on sait qu'on va en avoir plein la vue. Au début, c'est la libération du fils de l'émir qui est en jeu. La seconde fois, on assiste à une étourdissante course-poursuite dans les rues (et sur les toits) de la ville fortifiée. Plus tard, les deux époques finissent par se rejoindre...

   Cela nous amène aux scènes contemporaines, se déroulant pour la plupart dans un complexe secret, évidemment ultramoderne. L'une des réussites du film (et de la réalisation) est la synchronisation (à l'écran) des deux époques, principalement à travers le personnage du héros, Cal Lynch (Michael Fassbender très bon, un peu à l'image de ce qu'aurait pu faire Viggo Mortensen dans le rôle). Les cinéphiles repèreront dans une scène de prison du début un clin d'oeil à Hunger, le film qui a jadis révélé l'acteur.

   Dans ce complexe, on reconnaît une multitude de visages connus, à commencer par celui de Marion Cotillard, dont j'ai pu constater (pour avoir vu le film en V.O. sous-titrée), qu'elle maîtrise désormais très bien langue de Donald Trump Barack Obama. L'actrice n'a pas un rôle aussi fouillé que dans le récent Alliés, mais elle est quand même meilleure que dans The Dark Knight rises.

   Parmi les autres figures, je distingue Ariane Labed (remarquée dans Voir du pays), Michael K Williams et Denis Ménochet. Du côté des anciens, Jeremy Irons fait le job, mais j'ai été un peu déçu par les prestations de Charlotte Rampling et Brendan Gleeson. Enfin, sous les traits de la mère de Cal Lynch, j'ai eu le plaisir de retrouver Essie Davis, la piquante interprète de Phryne Fisher, héroïne la série consacrée aux aventures de cette détective australienne de l'Entre-deux-guerres.

   Pour la petite histoire, signalons qu'Essie Davis est la compagne du réalisateur Justin Kurzel. Celui-ci semble aimer travailler en famille, puisque la musique (au diapason de l'action) a été composée par son frère Jed. (On pourrait ajouter que Cotillard et Fassbender étaient déjà à l'affiche de son précédent film, Macbeth.)

   Voilà. Cela ne va pas changer l'histoire du cinéma, mais, vu dans une grande salle, c'est un beau spectacle. Outre les limites énoncées au début, je lui reprocherais aussi un fond un peu manichéen. Les méchants sont les élites catholiques du XVe siècle et leurs lointains successeurs comploteurs-apprentis-maîtres-du-monde de nos jours. Les gentils sont les rebelles à capuche... On comprend quel est le public ciblé...

   Un conseil pour terminer : choisissez soigneusement votre place dans la salle, parce qu'il semblerait que ce film soit un aimant à blaireaux !

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dimanche, 25 décembre 2016

Baccalauréat

   Sous ce titre se cache un film roumain (récompensé à Cannes par le prix de la mise en scène) de Cristian Mungiu, dont l'action se déroule dans une petite ville de Transylvanie.

   Le héros est médecin à l'hôpital local. Il est respecté à la fois pour ses compétences et pour son intégrité, une rareté dans la région, gangrenée par la corruption et les passe-droit. Bien qu'appartenant à la bourgeoisie locale (son épouse est bibliothécaire), il habite dans un appartement que nous Français aurions tendance à trouver ordinaire (mais le couple en est propriétaire). On comprend très vite qu'une part non négligeable des revenus des parents a été "investie" dans l'éducation de leur fille unique Eliza (Maria Dragus, bourrée de talent), une adolescente en apparence sans histoire, bosseuse et douée pour les études.

   Ah, j'oubliais : le papa médecin (prénommé Romeo !) a une vie secrète. A quelques indices, on comprend qu'il a dû avoir une aventure avec l'une des infirmières de l'hôpital. Surtout, au moment où commence l'histoire, il entretient une liaison avec une charmante institutrice, de dix ans plus jeune que son épouse.

   Après avoir brossé ce tableau de vie de province, le scénario nous entraîne lentement sur la voie du dérèglement. C'est un accident qui fait déraper la machine : Eliza est victime d'une agression, juste avant de passer les écrits du bac, dont les notes sont déterminantes pour valider l'inscription dans une prestigieuse université britannique.

   A partir de là, on suit le déroulement de plusieurs pelotes : le médecin intègre doit décider jusqu'où il est prêt à aller pour que le programme établi pour sa fille se concrétise. C'est d'autant plus délicat qu'au départ, il n'est question que de services mutuels. Rien de trop illégal. Mais, une fois qu'on a le doigt dans l'engrenage... Les seconds rôles masculins sont excellents, criants de vérité.

   La deuxième pelote est celle de la vie privée de Romeo. La relation avec l'institutrice se complique, tout comme la vie avec son épouse. Mais le pire est qu'il sent qu'il perd prise vis-à-vis de sa fille. L'agression dont elle a été victime semble l'avoir changée. De surcroît, le papa découvre que le petit copain exerce une influence plus grande que prévu sur sa progéniture. Enfin, quelle autorité peut-il conserver sur Eliza (à laquelle il a inculqué ses principes moraux), quand celle-ci découvre son infidélité et les manoeuvres dans lesquelles il s'est engagé ?

   La troisième pelote est l'évolution psychologique de la fille. Au départ, on ne nous la présente que comme une très bonne élève. Ensuite, on a tendance à la voir comme une victime, traumatisée par l'agression dont elle a été victime. Enfin, elle apparaît sous un jour nouveau, plus indépendante, plus mature.

   La tension monte progressivement, d'autant plus que Romeo se sent observé. Une pierre a été lancée dans la vitre de son salon. Plus tard, c'est la voiture qui subit une dégradation. Là-dessus débarquent des magistrats, qui enquêtent sur les manigances d'un caïd local. Cela culmine une nuit, dans un quartier louche, quand le père tente de trouver la solution de l'une des énigmes. A ce moment-là, la caméra à l'épaule suit le personnage. On partage son trouble, tout en percevant l'aspect inquiétant de son environnement.

   Voilà donc une oeuvre majeure de l'année 2016, portrait intime d'une famille en dé/re-composition, tableau d'une société très inégalitaire et questionnement moral.

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samedi, 24 décembre 2016

Ressorties de Noël

   La période est propice aux rééditions. Plusieurs films d'animation de qualité en ont bénéficié en cette fin d'année. Il convient donc de surveiller la programmation des cinémas qui sont proches de chez vous : ces ressorties ne sont pas forcément annoncées avec fracas.

   On commence avec Wallace et Gromit - Les inventuriers, qui recycle deux épisodes des aventures des personnages créés par le studio Aardman (le vieux célibataire et son chien très futé) : Une Grande Excursion (A Grand Day out, qui voit nos héros se rendre sur la Lune) et Un Mauvais Pantalon (The Wrong Trousers, inspiré sans doute de Fenêtre sur Pacifique, avec Michael Keaton), deux petites merveilles qui datent d'un peu plus de vingt ans. A l'époque, la sortie de ces animations en pâte à modeler avait provoqué un mini-séisme dans le monde du cinéma. Aujourd'hui, on les ressort toilettées par la technologie numérique. On y a ajouté un court-métrage, qui se moque gentiment de la mode du selfie de l'autophoto. Notons que, pour toucher le jeune public, on  ne nous propose le plus souvent que la version française, ce qui nous prive du délicieux accent anglais de Wallace.

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   On continue avec Le Géant de fer, la première grande réalisation de Brad Bird, qui nous a donné par la suite Les Indestructibles, Ratatouille ou encore Mission : impossible - protocole fantôme. Même si l'animation n'a pas, à l'époque (1999) atteint la qualité de ce que l'on a connu plus tard, on s'aperçoit quand même du grand soin apporté aux détails du dessin. De surcroît, le scénario est béton : l'action se déroule en pleine Guerre froide, à la fin des années 1950, alors que les Etats-Unis sombrent en pleine paranoïa antisoviétique. Le film ne manque pas d'humour... ni d'émotion. A un moment, vers la fin, j'ai même eu les yeux qui piquent... Satanées poussières qui encombrent les salles obscures !

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   On termine avec un sacré retour en arrière, Alice comedies, une série de courts-métrages produits par le jeune Walt Disney dans les années 1920. Ces oeuvres mélangent scènes réelles et images d'animation. Trois des quatre petits films ont pour héroïne une adorable petite chipie blonde, incarnée par Virginia Davis, une gamine qui n'avait pas froid aux yeux ! C'est drôle, rafraîchissant... et révélateur de la maîtrise technique de la première équipe qui travaillait autour de Walt Disney. (Au passage, au vu des tenues portées par les gamines et des attitudes qu'elles adoptent, on remarquera que le puritanisme n'avait pas encore touché les productions destinées aux enfants.)

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   Joyeux Noël !

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vendredi, 23 décembre 2016

Ballerina

   Je n'avais a priori pas prévu d'aller voir ce film d'animation. Mais, le bouche-à-oreille étant bon, j'ai sauté sur l'occasion d'accompagner deux personnes de ma connaissance. J'espérais que ce que j'avais aperçu du contexte de l'histoire dans la bande-annonce se retrouverait dans le film... et je n'ai pas été déçu.

   L'ambiance est un mélange des œuvres de Charles Dickens et de Jules Verne, avec une pincée des univers de Disney et des mangas (comme Steamboy, dont l'action se déroule dans l'Angleterre victorienne). On se trouve dans un condensé des années 1870-1880, en France (en Bretagne et à Paris), alors que la Tour Eiffel est en construction... ainsi qu'un autre monument célèbre, que l'un des personnages baptise maladroitement la "Statue de la Puberté" ! (Du côté de l'humour, le scénario a visiblement cherché à ne pas choquer, ne préservant que quelques rares moments pipi-caca-prout.)

   La salle était majoritairement remplie de dames et de demoiselles, peut-être parce que l'héroïne et la plupart des personnages sont de sexe féminin. De surcroît, c'est Camille Cottin (qui a incarné «l'héroïne» de Connasse !) qui prête sa voix à Félicie. Mais j'ai aussi beaucoup aimé le personnage de la femme de ménage, qui va devenir une sorte de mère de substitution pour la gamine... et qui cache un passé que l'intrigue va contribuer à dévoiler.

   C'est un autre intérêt de ce film, en apparence enfantin : le soin apporté à l'évolution de certains personnages. On le voit au travers de deux hommes (le codirecteur de l'orphelinat et le maître de ballet), mais aussi de plusieurs femmes/filles. Les deux héros eux-mêmes (Félicie et son ami d'enfance Victor) sortent de l'aventure transformés, mûris. On nous propose une sorte d'adaptation de roman d'apprentissage, avec des leçons pour nos chères têtes blondes (brunes, rousses...) : dans la vie, il faut travailler pour réussir et il convient de ne pas se laisser décourager par quelques échecs. On suggère aussi aux bambins d'être compréhensifs vis-à-vis des adultes... et de leurs camarades.

   Ce fond assez noble s'appuie sur une belle technique. Les décors sont particulièrement soignés et les mouvements fluides et maîtrisés. S'ajoute à cela une représentation assez convaincante de la danse (de l'entraînement au ballet), bien que certaines scènes ne soient pas réalistes. On reste quand même proche du conte de fées (avec une méchante presque sorcière), Félicie l'enfant abandonnée ambitionnant de danser à l'Opéra de Paris. Mais, à cette époque de l'année, c'est le genre d'histoire qui fait du bien.

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jeudi, 22 décembre 2016

A Fond

   Cette comédie française associe l'ancien et le nouveau. Pour l'ancien, on a André Dussolier (en pépé libidineux... qui en fait des tonnes), José Garcia (plutôt bon) et Florence Foresti (caricaturale au possible... mais, parfois, ça lui va bien). La "nouvelle" génération est représentée par une partie de l'équipe de Babysitting : Vincent Desagnat, Charlotte Gabris, Vladimir Houbart (excellent en beauf rivé à sa bagnole) et surtout le réalisateur Nicolas Benamou. On peut aussi saluer la performance de Jérôme Commandeur en requin commercial de l'automobile.

   Dès le début, on est mis dans de bonnes dispositions, avec la description de la vie d'une famille de classe moyenne et quelques gags basiques mais efficaces. (Je suis client des coups portés par inadvertance, une pratique que l'on retrouve plus loin, une fois que les principaux personnages sont enfermés dans la voiture.) Par contre, j'ai eu du mal avec l'interprétation de Dussolier, un acteur que j'estime pourtant beaucoup et qui semblait avoir réussi sa conversion tardive dans la comédie populaire avec Adopte un veuf.

   L'un des ingrédients essentiels de l'histoire est le fameux monospace. Présenté comme un bijou de technologie, il fascine Tom (José Garcia), qui est comme un gamin devant ce nouveau (coûteux) jouet. Cela fait partie des petites observations, glissées ici ou là, qui donnent un peu de profondeur sociologique à un scénario somme toute très linéaire. Avant même que le régulateur de vitesse ne se mette à déraper, la pauvre voiture va subir ses premières avaries. Je ne vous dirai pas dans quel état elle achève le périple.

   C'est toute la famille qui va vivre ces aventures. A Tom et son père s'ajoutent l'épouse du premier, très bien jouée par une actrice inconnue (Caroline Vigneaux), et leurs enfants, un garçon et une fille qui ont leurs qualités et leurs défauts. On aurait pu s'attendre à ce que le scénario tombe dans la facilité à leur égard, en en faisant de petites pestes fouteuses de merde. Ce n'est pas le cas.

   Par contre, on ne peut pas dire que le portrait des gendarmes soit nuancé. C'est une caricature grossière, mais qui sert bien l'intrigue. Un autre personnage brut de décoffrage donne du tonus à l'histoire : Jacky, le pilote conducteur de la BMW jaune, qui va subir une série d'avanies qui ont fait hurler de rire la salle où je me trouvais. Puisque la couleur jaune joue un rôle dans cette histoire, je vous laisse imaginer quel liquide corporel se trouve au coeur d'un gag ENORME...

   Du coup, même si certaines scènes souffrent de quelques faiblesses, on est emporté par le rythme et les traits d'humour, qui tombent à intervalle régulier. J'ai aussi été agréablement surpris par la qualité des scènes d'action, un phénomène rare dans les comédies françaises contemporaines. Cela donne au final un bon divertissement, qui a ravi le public hétérogène qui avait rempli la salle.

   Une question demeure : pourquoi ce film a-t-il subi cet éreintement injustifié, de la part des critiques et de certains spectateurs de base (censés avoir assisté à une avant-première) ? On peut y voir plusieurs raisons.

   Tout d'abord, rappelons qu'il convient de se méfier des notes attribuées par les spectateurs sur Allociné. En règle générale, elles surévaluent les films. Il est logique de penser que les personnes qui ont apprécié, même moyennement, un long-métrage vont davantage s'exprimer que celles qui ont été déçues (sauf si elles se sont vraiment fait chier). De plus, une partie des appréciations laudatives sont le fait de faux spectateurs, des personnes qui ont intérêt à ce que le film marche. A l'inverse, le sujet ou la distribution d'un long-métrage peuvent inciter des internautes à "descendre" un film sans même l'avoir vu.

   Ici, c'est aussi le contenu qui a pu provoquer des réactions de rejet. L'une des séquences fait intervenir une famille d'obèses, présentés comme assez à l'aise financièrement, mais pas très propres et plutôt crétins. Ces clients d'une concession automobile (la même que celle dans laquelle s'est rendu Tom) vont subir un traitement grotesque, qui a bien fait rire dans la salle. Mais ce rire est-il sain ?

   D'autre part, la satire de la vie de famille que contient le scénario a pu gêner des spectateurs. Sans en dire trop, je peux affirmer que les circonstances exceptionnelles vont pousser les parents et le papy à révéler leurs petits secrets, pas très ragoûtants. Mais c'est aussi cela, la vie.

   Ne négligeons pas non plus le malaise qu'a pu susciter chez certains spectateurs masculins le portrait à charge du fana de bagnole. Quel plaisir que de voir ridiculiser ce genre de blaireaux, qui nous empoisonnent la vie sur les routes ! Mais tout le monde n'a sans doute pas la même opinion sur le sujet...

   Enfin, le rejet de la critique peut lui s'expliquer par d'autres facteurs. Il n'aura échappé à aucun des spectateurs que M6 soutient ce film, dans lequel la chaîne BFMTV est mise à l'honneur (encore que... les reporters montrés à l'écran ont l'air un peu stupides). Cela suffit peut-être à expliquer que certains professionnels aient regardé A Fond avec des oeillères. Ce n'est certes pas le film de l'année, mais c'est une comédie efficace, qui fait passer un bon moment.

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mercredi, 21 décembre 2016

La Sociale

   Je me suis un peu fait violence pour aller voir ce documentaire. Il y a trois ans, je m'étais ennuyé à la vision des Jours heureux, le précédent film de Gilles Perret (que je n'ai pas chroniqué sur le blog, comme cela m'arrive de temps à autre). Et, comme c'est une création de Rouge productions, je redoutais l’œuvre militante lourdingue.

   Première bonne surprise : c'est un documentaire rigoureux, dans sa construction comme dans sa démarche, même si l'on comprend très vite qu'il ne faut pas s'attendre à une irréprochable objectivité. Bien au contraire : le but du film est de montrer combien la "Sécu" est vitale pour notre pays. Au moins, les auteurs n'avancent pas masqués... et ils donnent la parole à des personnes "du camp opposé", même si je les soupçonne d'avoir sélectionné les plus caricaturales. (Je recommande tout particulièrement le médecin libéral, qui dénonce une France presque totalement communiste !)

   Deuxième bonne surprise : les images d'archives. Beaucoup m'étaient inconnues (celles des années 1940-1950). On a puisé dans les fonds du Parti communiste et de la CGT, présentés comme les principaux artisans de la création de la Sécurité sociale, à travers notamment l'action d'Ambroise Croizat, militant communiste dévoué, travailleur acharné, mort prématurément à 50 ans. Certes, on n'oublie pas de rappeler le rôle d'un haut fonctionnaire, Pierre Laroque. Cependant, de la même manière que les autorités ont eu tendance à minimiser le rôle des communistes dans la création de la Sécu, ce film a tendance à minimiser le rôle de ceux qui ne sont pas communistes. Juste retour du balancier, diront certains.

   Le documentaire est vivant parce que les images d'archives sont entrecoupées d'entretiens avec des chercheurs (un historien, un économiste et un sociologue), très intéressants. On voit et entend aussi souvent l'un des survivants de l'époque, Jolfred Frégonara (hélas décédé en août dernier) qui, jeune adulte, fut l'un des responsables départementaux chargés de mettre en œuvre cette véritable révolution sociale. (Au passage, l'insistance sur la capacité de travail de ces militants communistes est une leçon pour les gauchistes du XXIe siècle, plus prompts à lever le coude et beugler dans les rues qu'à déployer des efforts au service de la collectivité.) Âgé de plus de 90 ans, cet ancien cégétiste est la trouvaille de ce film. Il avait encore toute sa tête et sa rencontre avec les jeunes (futurs) cadres de la Sécu mérite le détour.

   L'histoire ne s'arrête pas aux années 1940-1950. Le documentaire évoque les premières tentatives de détricotage du filet social et souligne l'impact de l'arrivée au pouvoir du duo Thatcher-Reagan (au Royaume-Uni et aux États-Unis), au tournant des années 1970-1980. Il néglige toutefois de rappeler que, si le système a tenu aussi longtemps, c'est aussi parce qu'à droite, une partie non négligeable du personnel politique s'est rallié à cette pincée de socialisme dans notre économie de marché.

   A ce sujet, les temps semblent avoir changé, avec la victoire du plus libéral des candidats aux primaires de LR. Même si ce film a d'abord été tourné pour célébrer le 70ème anniversaire de la création de la Sécurité sociale, il est évident que son propos entre en résonance avec la campagne présidentielle qui est déjà engagée.

   P.S.

   Par un curieux effet du hasard, le documentaire est projeté à Rodez la semaine où sort un numéro du Canard enchaîné qui évoque les projets de François Fillon. Dans l'entourage de celui-ci, on tente de minimiser les dégâts provoqués dans l'opinion par la révélation de son programme social, d'inspiration néo-libérale. Ainsi, le détail des mesures prônées par celui qui est devenu le candidat officiel de LR a disparu de son site internet. Le Canard s'est fait un plaisir de le remettre en ligne. Bonne lecture !

   P.S. II

   Sur le site dédié au film, on peut télécharger un dossier pédagogique assez bien conçu.

mardi, 20 décembre 2016

Rogue One : a Star Wars Story

   Un an après la relance de la franchise avec Le Réveil de la Force, Disney nous sert un entremets, histoire de nous faire patienter en attendant la sortie du volet VIII. Ici, l'intrigue se situe entre La Revanche des Siths (le troisième épisode de la "prélogie" sortie au début du XXIe siècle) et Un Nouvel Espoir (le premier film sorti dans les salles, à la fin des années 1970).

   L'Empire est dominateur, mais pas hégémonique. Les opposants sont multiples, mais divisés. Une énorme menace pèse sur eux : la construction d'une arme nouvelle, l’Étoile de la mort. L'enjeu de l'épisode est de réunir le maximum d'informations sur cette arme, mais aussi de fédérer les opposants à l'Empire.

   Le film mélange vieilles recettes et nouveautés, dans un ensemble qui m'a été très agréable à suivre : on ne voit pas passer les 2h10 ! Du côté du vieux pot, on retrouve l'ambiance des histoires de la première trilogie sortie dans les salles, notamment des épisodes IV et VI (Le Retour du Jedi). Les vaisseaux seront très familiers aux fans... et les effets spéciaux sont bluffants. On a réussi à faire revivre le "matériau" ancien avec des technologies modernes. Impressionnante est la scène de collision entre deux imposants vaisseaux. A couper le souffle est la représentation de la première utilisation de l’Étoile de la mort, avec un gigantesque séisme à la clé.

   Les personnages sont pour la plupart des petits nouveaux. Felicity Jones et Diego Luna sont très bien... mais j'ai un faible pour la demoiselle, qui incarne la jeunesse désabusée, qui ne croit plus en la politique (au départ). Elle entretient une relation très forte avec son père, incarné par Mads Mikkelsen, auquel Hollywood a fini par attribuer un rôle de "gentil". L'intrigue conduit à la formation d'une équipe bigarrée, où l'on retrouve un droïde, K-2SO, pas aussi savant que C-3PO (que l'on aperçoit brièvement avec R2-D2, vers la fin), mais très efficace avec une arme à feu.

   Cela nous amène tout naturellement aux têtes connues. A plusieurs reprises, on croise la route de Dark Vador, ainsi que celle d'un général (interprété par Peter Cushing) que l'on a vu déjà âgé dans les films d'il y a plus de tente ans. C'est quand même beau la technologie ! Elle peut même rajeunir Carrie Fisher, que l'on se réjouit de retrouver en jeune princesse Leia, à la toute fin, sans doute peu avant qu'elle ne transmette des informations capitales à un droïde que l'on apprécie beaucoup...

   C'est donc un très bon spectacle, surtout sur un grand écran, servi par une musique que l'on reconnaît immédiatement. Le réalisateur Gareth Edwards (auquel on doit le médiocre Godzilla) a été à la hauteur de la tâche qui lui était confiée. De surcroît, je trouve qu'il est gonflé, de la part de la production, d'avoir sorti ce genre d'«interlude», en sachant que les fans pourraient ne pas être intéressés par la vision d'un film qui repose sur des personnages mineurs et dont on connaît par avance l'essentiel du dénouement. C'est aussi le talent des équipes qui ont travaillé dessus, de donner vie à ces anonymes de la saga, en une sorte d'hommage aux "petites mains" de tout mouvement de résistance, dont l'action a contribué à la réalisation d'un grand dessein, sans que l'Histoire ait retenu leurs noms.

23:04 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Comment est-ce possible ?

   Récemment, je me trouvais dans un hypermarché de l'agglomération ruthénoise (appelons-le "Minus"). J'ai notamment déambulé dans le rayon "arts de la table", à la recherche de petites fourchettes, vous savez celles qui sont très utiles pour manger des produits souvent servis à l'occasion des fêtes de fin d'année. (Normalement, j'aurais dû me rendre dans une boutique située rue du Bal, en centre-ville, mais là, j'ai profité de l'occasion pour jeter un coup d'oeil.)

   Arrivé aux casiers regorgeant de couverts, j'ai machinalement jeté un oeil aux couteaux. Voici ce sur quoi je suis tombé :

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   Dès le premier regard, on repère le produit bas-de-gamme. Au toucher, on se rend vite compte que c'est un objet qui ne risque pas de faire de vieux os. Et que dire de son pris : 3 euros ! Pourtant, le nom d'un fabricant est gravé sur la lame :

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   De plus, en retournant le couteau, on peut voir une étiquette censée rassurer les acheteurs (avec un beau drapeau tricolore) :

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   La marque Jean Dubost n'est pas une invention de fraudeur tentant de faire passer sa camelote pour ce qu'elle n'est pas. Ce coutelier a pignon sur rue à Thiers et il communique sur le "made in France".

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   Qu'est-ce à dire ? Ce coutelier thiernois est-il victime d'un contrefacteur, qui aurait dupé la centrale d'achat qui approvisionne l'hypermarché ? Ou bien y a-t-il une réponse un peu moins limpide ?

   En cherchant sur la Toile, on peut facilement trouver des avis de consommateurs, notamment de ceux qui ont acheté des couteaux de cette marque. Force est de constater qu'ils sont contrastés. Soit ils soulignent la qualité de la marchandise, soit ils expriment la satisfaction d'un bon rapport qualité-prix (ce qui pourrait être traduit par "les couteaux ne sont pas d'une qualité exceptionnelle, mais, vu le prix payé, ça me suffit amplement"), soit ils témoignent d'une grande déception, comme ici.

   Cela fait quelques années déjà que le public informé sait que des couteaux Laguiole fabriqués en Chine peuvent être vendus sous marque thiernoise. (A côté de cela subsiste une importante production auvergnate de qualité et fabriquée sur place.) L'été dernier, Thierry Moysset, le directeur de la Forge de Laguiole, allait plus loin, affirmant qu'à Thiers même, il existait une production bas-de-gamme, ce à quoi j'avais du mal à croire.

   J'en ai trouvé confirmation sur le site d'Honoré Durand, un concurrent de la Forge (mais qui, comme elle, fabrique presque intégralement ses couteaux en Aveyron) :

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   Derrière ces couteaux bas-de-gamme se trouvent donc des robots, pas des ouvriers, un travail nettement moins élaboré et des matières premières moins coûteuses.

Tikkoun

   Dans la religion juive, ce terme peut faire référence à une prière de lamentation, un rituel de pénitence ou à la "réparation du monde". Cela fait sans doute allusion à la quête de perfection du personnage principal, le très zélé fils d'un rabbin orthodoxe de Jérusalem.

   Il faut tout de suite souligner la performance du jeune acteur Aharon Treitel, qui incarne avec une conviction stupéfiante cet intégriste gagné par le doute. Le début nous le présente comme un fondamentaliste plongé dans la lecture des textes religieux. C'est même un extrémiste chez les extrémistes : il est le plus assidu des étudiants de l'école juive, suscitant un étonnement mêlé de jalousie chez ses camarades.

   On sent aussi qu'il a pris son père pour modèle. Celui-ci est un rabbin respecté de la communauté. C'est le sacrificateur de l'abattoir cacher. Le fils cherche à lui ressembler physiquement (au point de porter des lunettes quasi identiques à celles de son père, alors qu'il n'en a nullement besoin) et intellectuellement. Mais, petit à petit, on se rend compte que le paternel pratique quelques accommodements avec le rigorisme religieux : il fume (parfois en cachette) et fait quand même passer la vie avant le respect littéral des textes sacrés. Cela le conduit à tenter de sauver son fils, victime d'un malaise et que les secouristes ne sont pas parvenus à ranimer.

   Le miracle qui se produit sous l'action du père va paradoxalement tout faire déraper. Je ne vais pas rentrer dans les détails ici, laissant à chacun le loisir de découvrir les changements qui s'opèrent chez Haim-Aaron et, par ricochet, chez les autres membres de sa famille. Même la petite communauté orthodoxe locale va en être bouleversée.

   L'action culmine une nuit brumeuse, après que le jeune homme a été pris en stop, son père ayant de son côté "pété les plombs" à l'abattoir (... ou mis ses actes en conformité avec ses convictions). Cela nous vaut certaines des scènes les plus "culottées" du film, l'une d'entre elles ne l'étant justement pas (au sens propre) !

   Signalons que c'est tourné en noir et blanc. Cela suscite une sorte d'étrangeté. Dans quel monde se trouve-t-on ? En tout cas, les rues de Jérusalem sont magnifiques et les animaux (phasme, grillon, vache, cheval, crocodile...) sont filmés avec un talent certain. Attention aussi : le réalisateur est plutôt de type contemplatif. Il aime les plans fixes chargés de sens. Aux spectateurs d'effectuer une partie du chemin.

dimanche, 18 décembre 2016

Le Voyage au Groenland

   Dans cette comédie française, deux amis prénommés Thomas partent sur l'île danoise à la rencontre du père de l'un d'entre eux, séparé de son épouse depuis des années, et installé dans un village d'Inuits dont il a (partiellement) adopté le mode de vie.

   C'est donc sur le choc des cultures que repose une partie de l'humour, avec, en plus, les quiproquos nés de la méconnaissance linguistique mutuelle. Comme l'histoire s'inspire de faits réels (et qu'elle met sans doute en abyme le parcours des deux acteurs principaux), cela aurait pu donner une de ces productions nombrilistes dont le cinéma français est coutumier.

   En réalité... pas du tout ! Le film comme ses comédiens ne se prennent pas au sérieux. On sent de l'autodérision dans le jeu des deux Thomas (Blanchard et Scimeca), le second me semblant doté d'une plus grande palette. De surcroît, les habitants du Groenland ne sont pas regardés avec mépris. Il y a de l'empathie aussi bien dans le comportement des héros à leur égard que dans la manière de les filmer. L'histoire n'en revêt pas moins un aspect documentaire, qui ne masque pas les difficultés de la vie sous ces hautes latitudes.

   Je pense que le scénario a voulu montrer que de la rencontre entre la dépression nordique et le mal de vivre occidental peut naître du bonheur... et de jolis moments de déconnade ! Parmi les personnages hauts en couleur, je recommande celui du chasseur mutique, qui n'est pas sans rappeler Takeshi Kitano. Au niveau de l'action, ce n'est guère trépidant, même si la découverte du mode de vie des Inuits sédentarisés ne manque pas d'attraits. (Les âmes sensibles seront choquées par les scènes de chasse, bien réelles.) La séquence la plus intense est incontestablement celle qui voit les héros français tenter de mettre à jour leur dossier Assedic, par internet, en passant par la version danoise d'un célèbre moteur de recherche : tout le village finit par se porter à leur secours !

   D'un point de vue technique, c'est bien fichu. On a droit à de superbes plans de plaines enneigées voire gelées. Par contre, la musique est un peu cheap. On sent qu'on a peut-être eu besoin d'économiser sur cette partie du budget. Cela n'en reste pas moins une comédie très rafraîchissante, en dehors des sentiers battus.

21:31 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

samedi, 17 décembre 2016

Planétarium

   Rebecca Zlotowski s'est inspirée de plusieurs histoires vraies pour concevoir le scénario de cet étrange film, dont l'action se déroule en France, dans les années 1930. Les héroïnes sont deux soeurs médiums, incarnées par Natalie Portman (désormais très à l'aise dans la langue de Bernard Cazeneuve) et Lily-Rose Depp (qui joue beaucoup mieux que ce que j'en ai entendu dire).

   Le problème est que, si l'interprétation est de bon niveau, la mise en scène n'est guère inventive et le scénario plutôt plan-plan. J'ai eu du mal à m'intéresser au devenir des deux frangines... et je ne parle même pas des lubies du principal personnage masculin (Korben), que les efforts d'Emmanuel Salinger ne suffisent pas à rendre sympathique.

   Une séquence m'a un peu "transporté". Elle se situe vers le milieu du film. C'est une soirée mondaine, arrosée au champagne, qui va prendre une nouvelle tournure avec l'apparition de la neige. Là, c'est inspiré !

   Pour le reste, on se désintéresse de la quête d'André Korben, dont l'obstination va provoquer la mort de l'un des personnages, sans que cela soit montré de manière négative. On aurait pu insister davantage sur sa judéité et les ennuis qu'il va rencontrer, dans une France officielle de plus en plus antisémite. Mais, là aussi, la question est traitée de manière allusive.

   Il reste l'interprétation de Natalie Portman, lumineuse. Pour ceux qui ont suivi la carrière de ce petit bout de femme, il est plaisant de constater qu'elle est devenue une actrice accomplie, subtile, hélas un peu perdue dans cette médiocre fiction.

12:42 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

vendredi, 16 décembre 2016

Premier Contact

   J'ai été alléché par l'offre : un film de science-fiction réalisé par Denis Villeneuve (auteur de Sicario, Enemy et Incendies), avec Amy Adams, Jeremy Renner et Forest Withaker au générique. On commence avec de très longues scènes d'exposition, qui nous présentent les principaux personnages et la situation mondiale (l'arrivée de vaisseaux spatiaux inconnus), qui n'a rien d'inédit dans le petit monde du cinéma d'anticipation.

   Il paraît que Villeneuve s'est d'abord inspiré de Rencontres du troisième type (de Spielberg). Moi, j'ai surtout vu des références à Mission to Mars et 2001 l'Odyssée de l'espace. Ce n'est d'ailleurs pas forcément déplaisant.

   Cependant, très vite, l'ambiance est plombée. Je ne sais pas si c'est dû au doublage, mais tout le monde m'a paru dépressif. Il y a tout d'abord l'héroïne (Louise), très souvent au bord des larmes ou de l'évanouissement. Mais les hommes qui l'entourent ne valent pas mieux : on dirait qu'ils sont sur le point de se tirer une balle ou d'accepter l'idée que la fin du monde est inéluctable. Scientifiques, militaires, bureaucrates et politiques ne brillent ni par leur réactivité ni par leur inventivité.

   Sauf Louise.

   On se dit assez vite qu'elle ne s'est pas retrouvée là par hasard. On a toutefois du mal à comprendre l'insertion régulière des scènes qui semblent se passer dans la tête de l'héroïne. Pour moi, tout s'est éclairé à partir du moment où elle a commencé à décoder le langage des extraterrestres. (Notons que ceux-ci sont sans doute la plus belle réussite de ce film, finalement très conventionnel.) Je vous donne un indice : le langage idéographique circulaire est le signe qu'il ne faut pas se fier à la notion linéaire du temps. En réalité, l'intrigue forme une boucle temporelle, que je me garderai bien de révéler, histoire de laisser aux éventuels spectateurs l'un des rares plaisirs que procure la vision de cette guimauve.

   Pour que cela tienne la route, il faut que le scénario nous mente. Le début nous induit donc en erreur. C'est l'un des messages transmis par un heptapode à Louise qui m'a fait tout comprendre. Je me disais aussi : d'habitude, les scénarios sur lesquels s'appuie Villeneuve sont autrement plus charpentés. A partir de là, tout prenait sens... mais c'était pour déboucher sur un tunnel de larmoyance et de vacuité, vers la conclusion prévisible de l'histoire.

   Concernant l'habillage, on alterne rigorisme et effet pompier. Les décors sont très réussis et suggèrent l'étrangeté avec une relative économie de moyens. Par contre, la musique... Au début, on nous asperge de sons graves et sentencieux, pour qu'on comprenne bien que la survie de l'humanité est en jeu. Vers la fin, l'aspect inéluctable du déroulement d'une partie de l'histoire est souligné par une autre musique, mi-gaie mi-désespérée... tout aussi chiante.

   Franchement, quelle déception !

23:19 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 15 décembre 2016

Papa ou maman 2

   J'avais deux craintes en allant voir ce film : que les auteurs n'aient cherché qu'à exploiter le filon du premier volet (une merveille d'humour corrosif, pour moi) sans se renouveler et que les meilleures scènes soient concentrées dans les bandes-annonces.

   Comme dans le premier, on nous offre dès le début un joli plan-séquence, très maîtrisé, cette fois-ci dans une maison... et même dans deux, puisque les ex-époux ont choisi d'habiter de chaque côté de la même rue, dans une banlieue bourge de Paris. Du coup, presque tout est en double dans cette famille... jusqu'aux chiens, dont je vous laisse découvrir les noms...

   Arrive assez vite la séquence que l'on attend, pour en avoir goûté une part dans la principale bande-annonce : le dîner des deux couples. C'est encore mieux que ce qu'on en a vu. La séquence est assez longue et riche en réparties cinglantes, Laurent Lafitte se révélant une fois de plus excellent à ce petit jeu. Et pourtant, entre la transpiration sous les bras et sa sciatique, son personnage en prend pour son grade !

   L'intérêt est relancé à partir du moment où ce sont les trois enfants qui tentent de prendre les choses en mains. En deux ans, ils ont grandi et les scénaristes ont accordé plus d'autonomie à leurs personnages (alors que les nouveaux compagnons des héros sont surtout des faire-valoir). J'ai adoré la séquence du coup monté avec le smartphone de Florence (Marina Foïs, toujours aussi percutante). On se doute bien que cela va déraper... mais l'on n'imagine pas à quel point, surtout grâce à Michel Vuillermoz, dont l'intervention ne manque pas de "mordant" !...

   C'est que les enfants aimeraient bien que leurs parents se rabibochent. Un séjour à la Réunion va être le prétexte de cette comédie des apparences, où le duo de héros n'est jamais sur la même longueur d'onde que les enfants. C'est habilement mis en scène, d'autant plus que les personnages changent d'avis en cours de route !

   Cette partie contient un petit moment d'anthologie : une scène père-fils, entre hommes, au cours de laquelle les deux mâles vont filer la métaphore culinaire (entre nems et porc au caramel, le tout sur fond de Youporn). C'est évidemment une parodie des scènes de ce genre, qui pullulent dans les productions américaines grand public. On notera que ce sont les enfants qui se comportent comme des adultes responsables, les deux parents semblant revivre une part de leur adolescence... au désespoir de la grand-mère (Nicole Garcia, très bien) !

   Un vent de folie va se mettre à souffler sur cette réunion familiale, qui n'est pas sans rappeler le règlement de comptes du premier épisode, qui aboutit à la destruction de la maison. Ici, on finit par se battre à coups de poules ! La toute fin est un peu prévisible, mais elle constitue un ultime pied-de-nez et clôture une très agréable comédie, pas aussi tordante que la précédente, mais au cours de laquelle j'ai souvent ricané.

23:40 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

dimanche, 11 décembre 2016

Doctor Strange

   C'est ce qu'on appelle une séance de rattrapage. J'ai trop tardé avant de me décider à aller voir ce film qui, du coup, n'était plus programmé ou alors uniquement en 3D, un calvaire de près de deux heures que je refuse d'imposer à mes yeux.

   Et pourtant, au vu de la qualité des effets spéciaux (parmi les plus spectaculaires qu'il m'ait été permis d'observer), le visionnage en 3D peut se justifier dans le cas de ce film. Dès la séquence inaugurale, on nous en met plein la vue, avec, de surcroît, l'intervention de deux très bons acteurs : Tilda Swinton et Mads Mikkelsen, qui fait de nouveau un très bon méchant.

   Mais, bien vite, l'attention des spectateurs est focalisée sur Stephen Strange, sorte de décalque de Tony Stark : il est jeune, beau gosse, brillant, arrogant, riche. Dans le rôle, Benedict Cumberbatch est à son aise, même si, pour le public de la version française, il faut s'habituer à une voix de doublage qui n'est pas celle qu'on lui connaît, notamment dans la série Sherlock. Clin d'œil du scénario : quand Strange émerge d'un immeuble londonien où il a été téléporté, il se trouve 177 A, Bleecker Street, une possible référence au célèbre 221 B Baker Street. (Mais c'est aussi une adresse de Strange dans la bande dessinée d'origine.)

   A partir du moment où Strange perd presque tout, l'histoire prend de l'épaisseur, même si l'on n'échappe pas aux idées reçues sur les philosophies religions orientales. Le nouvel apprenti magicien se révèle là encore doué, ce qui fait qu'il brûle les étapes... et permet à l'intrigue d'avancer !

   Ce sont de nouveaux les effets spéciaux qui occupent l'attention. C'est vraiment impressionnant, bien que l'accumulation puisse lasser, à la longue. Fort heureusement, on a émaillé certaines scènes de pointes d'humour, qui rendent l'ensemble moins sentencieux (un défaut majeur à mes yeux de certains films de super-héros). Au départ, c'est l'humour sarcastique du chirurgien (et celui de sa charmante collègue) qui font mouche. Par la suite, ce sont les difficultés du nouvel apprenti qui sont sources de gag. La séquence la plus drôle est pour moi celle de l'opération que subit Strange, alors que son double astral se bat avec l'un des "zélotes". J'ai aussi apprécié tout ce qui a trait à la cape de lévitation, presque un personnage en soi (un peu comme la Chose dans La Famille Adams).

   Bref, ce n'est sans doute pas un grand film, mais c'est incontestablement un bon spectacle, à voir sur grand écran.

   P.S.

   Ne quittez pas la salle trop vite : le générique s'interrompt pour nous livrer une scène bonus, entre le héros et un type que l'on a l'habitude de voir porter un gros marteau. C'est drôle... mais c'est surtout l'annonce d'un prochain film... et ce n'est pas terminé : on revoit l'un des personnages de Doctor Strange au bout du bout.

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samedi, 10 décembre 2016

Mademoiselle

   Park Chan-Wook, le brillant réalisateur de Old Boy et de Je suis un cyborg, s'est lancé dans l'adaptation d'un roman britannique, qu'il a transposé dans la Corée sous occupation japonaise, dans les années 1930-1940. (La présence de soldats japonais, visible à plusieurs reprises, est sans doute liée à l'invasion de la Chine, pour laquelle la Corée a servi de base arrière.)

   Ce passionnant thriller fonctionne sur le principe des faux-semblants : ce que l'on voit à l'écran n'est qu'une version de l'histoire... pas forcément la bonne. Cela commence dès la séquence dans le local des truands, qui s'achève sous la pluie par des répliques qui ne prennent tout leur sens que bien plus tard.

   La première partie nous est racontée du point de vue d'une voleuse qui se fait engager comme servante (incarnée par une actrice inconnue, retenue à l'issue d'un imposant casting... et vraiment canon). On pourrait appeler cela "La vie, l'amour, la guerre, l'argent". A peu près tout le monde ment dans cette histoire, pour des raisons différentes. On comprend très vite que l'oncle de la richissime héritière est une crapule, mais on ne découvrira à quel point que dans la toute dernière partie du film.

   La première heure nous compte la mise en place d'une arnaque, dans un cadre magnifique. Dès l'arrivée de la servante dans la propriété, on est saisi par la beauté des paysages et l'habileté des mouvements de caméra. Le réalisateur se montre aussi expert dans l'utilisation des espaces intérieurs, avec un jeu parfois ironique sur les mouvements des parois coulissantes.

   Toutefois, au bout d'une heure, on se rend compte qu'il y a arnaque dans l'arnaque. Je ne vais bien entendu pas dire pourquoi. C'est le moment que choisit Park Chan-Wook pour nous montrer l'envers du décor, avec quelques pointes d'humour... et une pincée d'érotisme. A la fin de cette deuxième partie, on se dit qu'il n'a toutefois pas tout expliqué. C'est parce qu'il en a gardé sous le coude.

   Et nous voilà partis pour le troisième volet de l'intrigue (plus court), qui permet de comprendre certains détails (comme la présence d'une corde à un arbre)... et qu'il y a arnaque dans l'arnaque de l'arnaque ! C'est savoureux et trépidant, le scénario ménageant des rebondissements quasiment jusqu'à la fin. La conclusion m'a cependant paru inutile, ce qui n'enlève rien aux mérites de ce film extraordinaire, foisonnant et très bien interprété.

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vendredi, 09 décembre 2016

Louise en hiver

   Ce film d'animation est assez culotté : son héroïne est une vieille femme misanthrope, qui se retrouve seule dans une station balnéaire normande, un soir de septembre, après avoir raté le dernier train. Et les grandes marées de septembre arrivent...

   Il faut tout de suite signaler la grande réussite à la fois scénaristique et visuelle du film : nous faire croire que l'héroïne se retrouve sur île, alors qu'elle est coincée sur une portion du continent coupée du monde. On suit donc notre Robinson du troisième (quatrième) âge, en plein stage de survie autour d'une plage déserte... et la mamie se débrouille plutôt bien ! Elle va même réussir à mettre en culture la portion de terre la plus fertile du coin : le vieux cimetière de l'église paroissiale ! Ça et le produit de la pêche (et de la cueillette) vont lui permettre de passer l'automne, l'hiver... et même davantage.

   Bien que prenants pour une dame âgée, les travaux physiques lui laissent amplement le temps de gamberger. Et voilà le passé qui ressurgit. Celui d'une enfant délaissée par sa mère, qui va finir par s'attacher à une grand-mère d'apparence revêche, mais qui va lui donner accès à un monde enchanté, celui de la campagne et de la débrouille.

   Louise revit aussi ses premières amours. La mémé misanthrope cache une ancienne amoureuse intense, gourmande même. Il semble que cela lui ait joué des tours. La perte de son premier amour lui revient en pleine figure. Et puis il y a le cadavre du parachutiste anglais, avec lequel elle dialoguait volontiers à l'époque.

   Louise va quand même se faire un nouvel ami, qu'elle va surnommer Pépère. Non, il ne s'agit pas de François Hollande, dont l'agenda récemment allégé lui laisse pourtant tout loisir pour faire la conversation à une grand-mère esseulée.

   L'intérêt de cette animation est aussi visuel : c'est une élégante gouache numérique, parfaitement adaptée à l'univers d'une plage battue par les vents et (parfois) inondée de soleil.

   L'intrigue semble se diriger vers une fin prévisible, mais, fort heureusement, on a décidé de nous surprendre aussi sur ce plan-là. Résultat : cette animation, furieusement poétique, est une découverte à ne pas manquer.

00:47 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 08 décembre 2016

Vaiana, la légende du bout du monde

   Voici venu le Disney de fin d'année, entouré d'un parfum exotique, puisqu'il met en scène une légende polynésienne. L'intrigue s'appuie d'ailleurs sur des recherches sérieuses, portant sur les voyages d'exploration réalisés par les peuples du Pacifique, capables jadis de traverser de grandes portions de l'océan sur de frêles embarcations.

   Traditions, tatouages et cocotiers sont les marqueurs identitaires du début de l'histoire, qui nous présente l'héroïne, adorable gamine devenue une adolescente aventureuse (et charmante). Elle est l'objet de la vigilante surveillance de son chef de père, mais trouve une meilleure écoute auprès de la mère de celui-ci, une mamie un peu dingue, mais qui connaît plein de choses. Elle sait même comment effrayer les bambins de l'île avec des histoires à dormir debout ! Les plus belles scènes sont néanmoins celles qui font intervenir l'eau, celle du lagon comme celle de l'océan.

   L'intrigue décolle vraiment quand l'héroïne rencontre le principal personnage masculin, un gros baraqué imbu de lui-même... et souvent drôle (même involontairement). Dans la version française, la voix d'Anthony Kavanagh contribue fortement à rehausser l'intérêt pour le personnage. D'un point de vue visuel, j'ai adoré les jeux sur les tatouages (ceux du colosse sont mobiles), avec une préférence marquée pour son "Mini-Moi", très cocasse. Je n'ai par contre guère goûté les pathétiques tribulations du coq débile qui, dans la salle, n'ont fait rire que les moins de six ans. Le personnage du petit cochon domestique m'a à peine plus convaincu, tant il est une resucée de figures déjà rencontrées ailleurs.

   Pour moi, l'action culmine dans la séquence du crabe. Visuellement, elle est splendide et n'est pas sans rappeler un passage de La Princesse et la grenouille. Quant au personnage principal, adversaire des héros, il semble être un décalque du Smaug vu dans Le Hobbit 2.

   Finalement, alors que je me demandais comment le scénario allait pouvoir tenir la distance (presque 1h50), on nous ménage suffisamment de rebondissements pour que l'intérêt soit maintenu jusqu'à la fin, avec une résolution de l'intrigue ma foi assez intelligente. Reste que le plaisir est quand même gâché par les chansons, surtout présentes dans la première partie. J'ai eu l'impression d'entendre la même voix que dans La Reine des neiges. Beurk !

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lundi, 05 décembre 2016

Mauvaise traduction

   Actuellement, France Ô rediffuse la saison 5 de Meurtres au paradis, une série policière (comique) produite par la BBC et tournée en Guadeloupe. L'été dernier, c'est sur France 2 que les épisodes avaient été programmés, notamment "Le Rocher de la discorde", qui met en scène une rivalité entre l'île de Sainte-Marie (anglaise, mais autrefois française) et un département d'outremer nommé Saint-Robert, tout aussi fictif.

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   Au cours de cette scène, l'inspecteur Humphrey Goodman (débarqué d'Angleterre) se fait expliquer les subtilités de l'histoire et de la géographie locales. Sur la carte murale, j'ai entouré l'île de Saint-Marie, située juste au nord de sa rivale Saint-Robert, les deux étant encadrées par d'autres bien réelles, la Guadeloupe (en forme de papillon) au nord et la Dominique au sud. Dans la réalité, comme on peut le constater dans l'image extraite de GoogleEarth ci-dessous, rien ne se trouve entre la Guadeloupe (et ses dépendances) et la Dominique :

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   La "francitude" n'en constitue pas moins l'un des aspects de l'intrigue. Le scénario égratigne la présence française à travers le personnage antipathique du président du Conseil général François Tromeur (qui a de petits airs de Laurent Wauquiez) :

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   C'est une caricature de "Parisien", homme arrogant et mari volage, ce qui me fait dire que les scénaristes se sont trompés de cible. Ce n'est pas un élu local que le personnage aurait dû représenter, mais un haut fonctionnaire, comme un préfet ou un haut commissaire.

   La langue française est elle aussi présente dans l'épisode, à travers certains dialogues (dans la version originale anglaise)... et à travers la Une d'un journal local (côté français), qui comporte une coquille :

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   Voilà une erreur ("history" devenue "historie" ou lieu d'"histoire") qui n'aurait pas échappé à un oeil français !

dimanche, 04 décembre 2016

Tu ne tueras point

   Dix ans après Apocalypto, Mel Gibson revient (à la réalisation) avec un projet qui lui a été proposé à plusieurs reprises avant qu'il ne l'accepte : rendre hommage à Desmond Doss, un membre de l'armée américaine qui s'est illustré à la bataille d'Okinawa (en 1945), tout en refusant de porter une arme.

   Après un court aperçu de l'horreur du champ de bataille, un retour en arrière nous ramène au coeur des Etats-Unis, dans l'enfance puis l'adolescence du héros. C'est un fils de vétéran de la Première guerre mondiale, qui a perdu tous ses amis au combat, en France. Il est revenu de là farouchement opposé à la guerre... et diablement alcoolique. Le jeune homme en a souffert et semble avoir trouvé refuge dans la lecture de la Bible, encouragé par les convictions adventistes de sa mère. Dans le rôle du père, Hugo Weaving est excellent.

   J'ai lu ici ou là que cette première partie était un peu mièvre, l'acteur principal Andrew Garfield n'ayant pas un charisme démentiel. A la réflexion, je pense qu'il s'est coulé dans le personnage et dans l'époque, qui n'était pas aussi "décoincée" que la nôtre. La bluette sentimentale qui se noue avec la ravissante infirmière se comprend dans ce contexte. (A ce propos, signalons que cet amour de jeunesse s'est mué en mariage durable.) De surcroît, je pense que Mel Gibson, peut-être lassé de l'hypersexualisation des rapports humains dans les médias, a voulu mettre en scène un amour chaste, non ostentatoire bien que très réel. Comme il est malin, il a choisi une actrice canon pour incarner la dulcinée du héros : Teresa Palmer (aperçue cette année dans Triple 9) est parfaite dans le rôle.

   Vient ensuite la période de formation des recrues. On assiste à la fois à la naissance d'une camaraderie et à l'explosion du harcèlement, à partir du moment où Desmond met en avant ses convictions. La petite troupe est crédible (avec une pléiade de visages connus) et j'ai bien aimé l'interprétation de Vince Vaughn en sergent autoritaire, vexant, mais humain au fond. Il ne fait toutefois pas oublier Clint Eastwood dans Le Maître de guerre ni surtout Ronald Lee Ermey, inoubliable sergent Hartman dans Full Metal Jacket (auquel cette séquence fait visiblement référence).

   La deuxième partie du film se passe sur le terrain, à Okinawa. La première scène de combat est d'un réalisme stupéfiant, ne cachant rien des horreurs de la guerre... et même, parfois, semblant un peu magnifier celle-ci. La mise en scène se fait esthétisante. C'est l'une des ambiguïtés que l'on peut reprocher à Mel Gibson.

   Mais le meilleur est à venir, avec cette nuit de tous les dangers, au cours de laquelle l'infirmier non armé va sauver des dizaines de soldats blessés de son unité, laissés sur le champ de bataille après une contre-offensive japonaise. C'est un magnifique hommage au courage et à la non-violence, à rebours d'une certaine vulgate hollywoodienne (le culte du héros en arme).

   La composante religieuse de l'intrigue pose néanmoins problème. Pas les convictions du héros, tout à fait respectables, mais le côté "guerre sainte" que le réalisateur donne à la prise de cette position fortifiée. Les Japonais sont quasi systématiquement présentés comme des barbares sans foi ni loi, d'une cruauté sans nom (alors que la violence des soldats d'Oncle Sam apparaît justifiée). Il y a bien cette rencontre dans un tunnel pour nuancer un peu, mais l'on notera que l'initiative du rapprochement vient de l'Américain. Quant à la scène de seppuku de l'officier, vers la fin, elle arrive comme un cheveu sur la soupe et me gêne un peu : pourquoi serait-ce l'élite (celle qui a poussé les soldats à commettre des horreurs) qui serait plus digne ? De ce point de vue, Lettres d'Iwo Jima (de Clint Eastwood) était bien plus profond.

12:43 Publié dans Cinéma, Histoire | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

Tourisme culturel

   De temps à autre, pour des raisons professionnelles ou bien personnelles, il m'arrive de me rendre dans le département du Tarn. Même s'il est (pour moi) moins joli que l'Aveyron, il se visite avec plaisir, aussi bien en milieu urbain qu'en zone rurale.

   Je me suis récemment retrouvé à Gaillac. D'habitude, je me cantonne à un quartier de cette petite ville. Là, comme j'avais un peu de temps devant moi, je me suis baladé un peu partout, sans but précis. Je me contentais d'observer l'architecture ancienne (qui n'est pas sans rappeler celle du vieil Albi) lorsque mon regard fut attiré par une étrange plaque :

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   J'ai apprécié ce pied-de-nez au tourisme de l'anecdote, qui tente de mettre en valeur la moindre pierre pour peu qu'un vague évêque ou comte d'une époque reculée ait uriné dessus. Si un jour vous passez par Gaillac, levez donc un peu la tête rue de la Portanelle.

   Pas très loin de là se trouve une ancienne abbaye, où sont logés aujourd'hui un musée, l'office du tourisme et... la Maison des vins, où il est possible de déguster gratuitement quelques-uns des crus de la région. Si, en plus, on achète une ou deux bouteilles, on peut approfondir (sur place puis chez soi) sa connaissance des liquides fermentés locaux...

samedi, 03 décembre 2016

L'hémicycle de Midi-Languedoc

   Il en a été question aujourd'hui dans un article du quotidien Midi Libre. C'est l'un des sujets de déconnade au sein de la nouvelle (et artificielle) grande région... Mais ne riez pas trop, parce que c'est avec notre pognon que cela se fait !

   Voilà le problème : le conseil régional de Midi-Languedoc est composé de 158 élus, soit presque la somme exacte du nombre d'élus des anciens conseils régionaux de Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon (91 + 68 - 1). Or, aucun bâtiment officiel existant ne peut contenir un groupe aussi nombreux. Du coup, c'est... au parc des expositions de Montpellier que se déroulent les assemblées plénières. Voici ce à quoi cela ressemble :

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   On nous a vendu la fusion comme devant être une source d'économies... On attend de voir. En tout cas, cette histoire d'assemblée plénière est en train de devenir une plaie budgétaire. D'après ce qu'a dit Carole Delga au cours de la dernière réunion, la visio-conférence serait sur le point de se mettre en place pour les commissions sectorielles, ce qui limiterait les déplacements. Néanmoins, il reste le cas des assemblées plénières et des réunions de la commission permanente.

   Construire ex-nihilo un nouveau bâtiment pour un usage somme toute limité serait, en ces temps de frugalité budgétaire, très mal vu (et sans doute superflu). On pourrait donc se contenter de louer une salle pour les quelques réunions qui s'imposent... Mouais. Il existe une autre solution, plus audacieuse, mais qui permettrait de réaliser de substantielles économies (à partir de 2021), sans remettre en question le fonctionnement du conseil régional : la réduction du nombre d'élus, d'au moins 30 %. Si l'on va jusqu'au tiers, l'assemblée plénière perdrait 53 conseillers, pour passer de 158 à 105 membres, ce qui ne serait guère plus élevé que le total de conseillers de l'ancienne région Midi-Pyrénées (91). Je pense que l'hémicycle toulousain pourrait supporter cette modification, sans qu'il soit nécessaire d'engager de dispendieux travaux.

   La conséquence serait la diminution de la représentation de chaque département. Pour les Aveyronnais, cela conduirait à passer de 8 à 5 conseillers régionaux... que de toute façon l'écrasante majorité de la population ne connaît pas. Pour rappel, voici ceux qui ont été élus en 2015 :

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   Le principal changement survenu depuis est le remplacement de Dominique Reynié par Christophe Saint-Pierre.

Sully

   Précisons au public français (cultivé) que le titre de ce film n'a (à ma connaissance) aucun lien avec le surintendant des finances du roi Henri IV. C'est le diminutif de Chesley Sullenberger, le commandant de bord qui, en 2009, a réussi l'exploit de faire amerrir un Airbus A320 de la compagnie US Airways sur le fleuve Hudson, sauvant ainsi 150 passagers.

   Derrière la caméra, Clint Eastwood n'a pas eu envie de tourner un film-catastrophe à grand spectacle. Oh, rassurez-vous, il a bien inséré quelques scènes spectaculaires, mais le véritable propos est ailleurs. L'histoire commence peu après l'amerrissage (que Sullenberger s'est refusé à appeler un "crash"). Alors que les médias traitent le pilote (Tom Hanks, impeccable) en héros, en coulisses, le Conseil national de la sécurité des transports et l'Agence fédérale de l'aviation enquêtent, histoire de savoir si une autre issue n'aurait pas été possible. En clair : l'amerrissage est perçu comme un véritable miracle, quasi impossible à réaliser. (Selon l'article wikipédia consacré à l'affaire, il y a deux précédents, mais très anciens.) Du coup, les experts pensent qu'il aurait été plus logique de se diriger vers l'un des deux aéroports les plus proches de l'avion au moment de l'accident, à savoir La Guardia (d'où il avait décollé) et Teterboro (dans le New Jersey, à l'ouest de New York), JFK se trouvant plus loin, à l'est.

   On est donc en plein dans le monde eastwoodien, celui d'hommes et de femmes a priori ordinaires, confrontés à l'adversité et qui, parfois, vont s'élever, donner le meilleur d'eux-mêmes. Cependant, en dépit de la minutie accordée à la description de l'action des personnages secondaires, tout tourne autour de Sully/Hanks, à tel point qu'Aaron Eckhart (le copilote) et Laura Linney (l'épouse aimante et éplorée) passent pour de simples faire-valoir. Le premier, remarqué jadis dans Thank you for smoking, est sous-utilisé. La seconde (vue récemment dans Mr Holmes) est cantonnée dans un rôle essentiellement plaintif, à tel point que cela en devient agaçant.

   Le fil rouge de l'intrigue (l'enquête sur les conditions de l'amerrissage) n'en reste pas moins fort agréable à suivre. Eastwood montre des hommes honnêtes en prise avec la bureaucratie, un thème cher au coeur du cinéaste républicain. Si je voulais être un peu polémique, je dirais que notre bon vieux Clint en profite pour instiller quelques idées à sa sauce, à savoir que les masses ont besoin d'hommes forts pour les guider... et que les élites sont plus nuisibles qu'utiles. (Son soutien à Donald Trump n'étonnera que les imbéciles.)

   Pour nous Frenchies, une séquence se révèle particulièrement intéressante. Les autorités américaines ont demandé au constructeur Airbus de recréer les conditions de l'accident dans leur simulateur, du côté de... Toulouse. Aux Etats-Unis, on n'a pu créer que des scénarios virtuels, à l'aide d'algorithmes, sur ordinateur. (Voici celui qui s'appuie sur le trajet de l'avion jusque sur l'Hudson.) Là, on voit des pilotes supposés français... qui, dans la version originale, parlent anglais. Notons que les équipages sont tous mixtes, l'un d'entre eux ayant pour commandant une femme. Clin d'oeil à la parité française ? (Je ne suis pas sûr qu'elle ait atteint la cabine de pilotage...)

   Petit à petit, les retours en arrière nous donnent une vision complète de l'événement, du point de vue de l'équipage comme de celui des passagers. Cependant, ceux-ci m'ont semblé peu exploités (le film dure pourtant à peine plus d'1h30) et, à leur sujet, Clint tombe de temps à autre dans le pathos. A l'arrière-plan, on perçoit l'ombre du 11 septembre 2001, à la fois dans les cauchemars de Sully, les angoisses des passagers et le dévouement des secouristes.

   L'ensemble forme un beau film altruiste, mais qui s'appuie parfois sur de grosses ficelles.

   P.S.

   Il y a quelques années, un documentaire a été tourné sur le même sujet. On y apprend notamment que le père qui a attrapé l'avion au dernier moment était accompagné d'un fils et non pas de deux (ce qui est le cas dans le film). On y découvre que l'un des personnages est interprété par la personne qui l'a inspiré (Vince Lombardi, le capitaine du ferry Thomas Jefferson, le premier qui se porte au secours de l'avion sur le fleuve)... et l'on apprend aussi que, si l'eau s'est engouffrée aussi rapidement dans l'avion, c'est peut-être parce qu'une manette de secours (dont l'utilisation est prévue dans le manuel d'urgence d'Airbus) n'a pas été actionnée. Curieusement, ce détail n'a pas retenu l'attention du scénariste.

   P.S. II

   Question à un centime d'euro : le nom de l'industriel aéronautique aurait-il été aussi abondamment cité dans le film s'il s'était agi d'un Boeing ?

12:56 Publié dans Cinéma | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : cinéma, cinema, film, films

jeudi, 01 décembre 2016

Les Enfants de la chance

   Encore un film sur la Seconde guerre mondiale, diront certains. L'an dernier, on a eu droit à Suite française et En mai, fais ce qu'il te plaît. Le plus étonnant est que l'histoire qui nous est contée est vraie... eh, oui, on continue à découvrir des choses sur cette période troublée, pourtant explorée dans tous les sens.

   Nous allons suivre le conflit, en France, du point de vue d'un groupe d'enfants, juifs et non juifs, mais qui ont en commun de souffrir de la tuberculose (ou d'une difformité). Malgré une belle introduction sur fond musical antisémite, le début a un goût de déjà-vu, surtout pour les spectateurs de La Rafle. Les premières scènes avec les enfants m'ont paru maladroites. Par la suite, j'ai trouvé cela meilleur. Me suis-je habitué à leur manière de jouer, ou bien a-t-on tourné le film de manière chronologique, les acteurs se perfectionnant au fil du temps ? Mystère.

   Toutefois, il en est un qui reste bon du début à la fin : Philippe Torreton, impeccable en médecin engagé, un peu bourru. Il est épaulé par une pléiade de seconds rôles efficaces.

   Paradoxalement, on se détache assez vite de la partie juive de l'intrigue (même si quelques piqûres de rappel viennent relancer la tension dramatique). C'est la lutte des enfants contre la maladie qui occupe notre attention. Les gamins, très différents les uns des autres, finissent par former une troupe, soudée par quelques chants et des blagues potaches, dont la principale victime est l'employé de l'hôpital chargé de l'entretien.

   On passe 1h30 tranquillement, sans déplaisir, mais sans être "transporté".

   P.S.

   L'un des intérêts du film est de proposer quelques dialogues dans la langue (aujourd'hui très affaiblie) parlée à l'époque par la majorité des juifs d'Europe centrale et orientale : le yiddish.